Le système fiscal à La Réunion

La fiscalité applicable dans les départements d’outre-mer se distingue de celle de la métropole sur plusieurs points :

  • Des mesures structurelles d’allègements fiscaux visent à augmenter le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises de ces départements afin de compenser les handicaps propres aux régions ultrapériphériques ;
  • Une fiscalité locale indirecte spécifique (octroi de mer et taxes sur les produits pétroliers) vient s’ajouter à la fiscalité locale directe ;
  • Le régime de TVA s’applique avec des taux inférieurs à ceux de l’hexagone ;
  • Le régime de défiscalisation des investissements se démarque du modèle métropolitain ;
  • On peut y associer les dispositifs destinés à diminuer le coût du travail ultramarin.

DES MESURES STRUCTURELLES D'ALLÈGEMENTS FISCAUX

 

Parmi les régimes fiscaux spécifiques en outremer, on distingue :

  1. Une réduction de la cotisation d’impôt sur le revenu de 30 % - plafonnée à 5 100 euros - pour la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion, et de 40 % - plafonné à 6 700 euros - pour la Guyane et Mayotte.
  2. L’instauration, par la Loi pour le développement économique des Outre-mer (Lodeom), de zones franches d’activité est venue alléger les prélèvements fiscaux des entreprises, en instaurant des abattements sur les bénéfices imposables (à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés) et sur les bases imposables à la cotisation foncière des entreprises, à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, à la taxe foncière sur les propriétés bâties et des exonérations en matière de taxe foncière sur propriété non bâtie. Ces avantages sont majorés pour une liste limitée de secteurs et certaines zones géographiques prioritaires. Le nombre d’entreprises bénéficiaires de l’ensemble de ces dispositions était d’environ 27 000 en 2014.

 

UNE FISCALITÉ LOCALE SPÉCIFIQUE

 

À côté de la fiscalité locale directe de droit commun, il existe une fiscalité locale indirecte spécifique aux départements d’outre-mer.

  • La fiscalité sur les produits pétroliers et le tabac

La taxe spéciale de consommation sur les produits pétroliers (TSC) est perçue au bénéfice des Régions et des collectivités territoriales, en lieu et place de celle applicable en métropole (TICPE, ex-TIPP). Il s’agit d’une taxe applicable à une liste limitative d’huiles minérales dont les taux, et éventuellement les exonérations, sont fixés par le Conseil régional de Guadeloupe ou de La Réunion, l’Assemblée de Guyane, en Martinique ou le Conseil départemental de Mayotte. Elle fait l’objet d’une affectation particulière, en faveur notamment du développement des routes en alimentant le Fonds d’investissement routier (FIR) géré par les collectivités. S’agissant du tabac, un droit de consommation est fixé par délibération des conseils départementaux et son produit est affecté au budget du département.

  • L’octroi de mer

L’octroi de mer est un impôt remontant au XVIIe siècle qui, à l’origine, taxait, lors de leur importation, toutes les marchandises arrivant dans les DOM par la mer. Après deux réformes majeures en 1992 et 2004, l’octroi de mer s’assimile aujourd’hui à une taxe indirecte sur la consommation, collectée uniquement dans les 5 DROM (Mayotte depuis le 1er janvier 2014) et qui frappe à la fois les produits importés et ceux produits localement.

 

La raison d’être de cette taxe recouvre deux objectifs distincts :

  • Assurer aux collectivités territoriales une fiscalité locale propre (les taux sont décidés par le Conseil régional de Guadeloupe ou de La Réunion, l’Assemblée de Guyane, en Martinique ou le Conseil départemental de Mayotte). L’octroi de mer vient en complément de la fiscalité locale directe dont le rendement est relativement peu élevé, à cause de la faiblesse des bases d’imposition et de l’insuffisance du recensement des bases fiscales. L’octroi de mer représente une ressource budgétaire importante pour les collectivités locales d’outre-mer, dont les communes, et constitue une part significative de leurs ressources fiscales. 
  • Encourager le développement de l’activité industrielle productive locale. Ce deuxième objectif se traduit par une taxation différenciée entre les produits importés et les produits fabriqués localement, pour une liste de produits limitativement fixée, par territoire, par leur nomenclature tarifaire douanière à l’annexe de la décision n°940/2014/UE du Conseil du 17 décembre 2014.

 

LES PARTICULARITÉS DE LA TVA OUTRE-MER

 

Dans trois départements d’outre-mer (en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion), la TVA fonctionne à des taux inférieurs à ceux de la métropole, mais vient se greffer sur l’octroi de mer. Le taux normal est à 8,5 % (contre 20 % au niveau national) et le taux réduit est essentiellement à 2,1 % (contre 5,5 % ou 10 % pour le taux intermédiaire dans l’hexagone). Ce régime dérogatoire en matière de différentiel de taux de TVA a bénéficié en 2014 à environ 67 000 entreprises domiennes et représente un coût moyen de 1,33 milliard d’euros en 2014 pour l’État. En outre, les DOM sont considérés comme des territoires tiers pour l’Union européenne : ils ne font pas partie du territoire communautaire en matière de TVA (article 3 de la sixième directive TVA). Les livraisons de biens de la métropole vers les DOM sont considérées comme des exportations, la TVA étant payée à la douane par l’acheteur (idem dans l’autre sens). La loi de finances 2010 a permis une modification des règles relatives à la territorialité en matière de TVA des prestations de services. Ainsi, la règle générale devient l’imposition à la TVA de la prestation au lieu d’établissement du prestataire.

TVA  non perçue récupérable

Les entreprises basées aux Antilles et à la Réunion bénéficient d’un régime dérogatoire de la TVA, appelé TVA non perçue récupérable (TVA NPR), qui permet de récupérer de la TVA sur certains intrants exonérés de TVA. Sa raison d’être est de donner un plein effet économique aux exonérations de TVA prévues pour l’importation de certains produits ou équipements dans les DOM, mais également de répercuter sur les prix de vente au consommateur cet avantage fiscal. La LODEOM a légalisé ce régime spécifique (il n’était jusqu’alors que l’application d’une instruction ministérielle de 1953) et l’a recentré sur les seuls biens d’investissements productifs neufs acquis ou importés et sur certains types d’intrants comme les matériaux de construction.

Sa disparition concernant les achats de matières premières et de produits par les entreprises est compensée par une aide au fret.

Des mesures spécifiques de défiscalisation des investissements

Pour favoriser les investissements en Outre-mer, qu’il s’agisse d’investissements productifs dans certains secteurs ou des investissements en logements, des dispositifs de défiscalisation, plus avantageux qu’en métropole, ont été successivement créés ou amendés par les lois dites « Pons » en 1986, « Paul » en 2001, puis « Girardin » en 2003 dans les départements et collectivités d’outre-mer. Ces dispositifs consistent en la réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables soumis à l’IRPP ou d’impôt sur les bénéfices pour les entreprises (déduction de leurs résultats imposables). En mai 2009, une modification législative du dispositif « Girardin » a été actée par la Lodeom, visant à abaisser les seuils d’agrément en deçà desquels la défiscalisation s’effectuait de plein droit dans un objectif de renforcer les contrôles, et à limiter les avantages qui ne se justifiaient plus (pour la navigation de plaisance notamment).

 

En ce qui concerne les investissements productifs, les principales modifications apportées par cette loi étaient les suivantes :

  • Deux nouveaux secteurs éligibles aux dispositifs de défiscalisation: celui de la recherche, en raison de son impact sur la compétitivité des entreprises, et celui du financement de projet de câbles sous-marins, en raison du coût élevé des liaisons et de la nécessité de sécuriser les communications ;
  • L’élargissement de l’avantage fiscal aux exploitants d’hôtel et non plus au seul propriétaire, afin d’aider ce secteur ;
  • Le taux de la défiscalisation sur les navires de plaisance est ramené à 50 % (après 70 %) en raison des nombreux abus constatés (délocalisation vers d’autres îles) et du constat que la flotte était désormais reconstituée ;
  • L’exclusion des véhicules de tourisme du dispositif de défiscalisation ;
  • La suppression du plein droit dans le secteur du transport ;
  • Le plafonnement des investissements dans le secteur des énergies renouvelables.

 

Des dispositifs visant à réduire le coût du travail

Plusieurs dispositifs coexistent pour diminuer le coût du travail. Il s’agit principalement de la réduction de la taxe sur les salaires pour les entreprises et d’un régime spécifique d’exonérations de charges sociales. Sur ce dernier point, le régime spécifique aux outre-mer d’exonérations de charges patronales de sécurité sociale, se traduit par un dispositif différencié de celui applicable en métropole (dispositif Fillon). Désormais, les entreprises éligibles sont différenciées selon trois catégories : soit en fonction de leurs effectifs (moins de 11 salariés), soit en fonction de leur appartenance à un secteur d’activité éligible, soit lorsqu’elles relèvent de secteurs prioritaires (entreprises éligibles aux zones franches globales d’activité, ZFA). L’intensité de l’aide ainsi apportée aux entreprises se décline en fonction de leur appartenance à l’une de ces catégories.

L’aide est également modulée en fonction de l’éligibilité ou non des entreprises au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Rappelons qu’il s’agit d’un avantage fiscal qui concerne les entreprises employant des salariés et équivaut à une baisse de leurs charges sociales. Les différentes formes d’exonérations se composent d’une exonération totale jusqu’à un certain niveau de SMIC, d’un plateau d’exonération puis d’une exonération dégressive. La mise en place du CICE a fait l’objet d’une déclinaison outre-mer via une majoration de son taux : le taux normal est de 6 % des rémunérations versées alors que dans les départements d’outre-mer, le taux est de 7,5 % des rémunérations versées en 2015, puis 9 % à partir de 2016.