Que doit-on analyser / vérifier lors de l’Audit d’acquisition ?

La problématique de l’acquisition d’une entreprise tient principalement au fait de la multiplicité des contraintes et informations à gérer, et ce, dans un délai court. A l’analyse du passé et de la structure financière de la société, à la connaissance du secteur d’activité concerné, s’ajoute la nécessaire anticipation des résultats futurs, tels que souvent appréhendés dans le budget prévisionnel fournis par l’entreprise « cible ». Au delà de ces éléments, d’autres éléments immatériels ont souvent une part au moins égale : la relation cédant-repreneur, la confiance « intuitive », le contexte d’ensemble, en un mot le « feeling ». 

 

Toute la difficulté tient donc à un juste équilibre entre les aspects immatériels attachés à la reprise, et les éléments objectifs, tels qu’ils peuvent être mesurés ou quantifiés par le repreneur et ses conseils. 

 

Dans notre mission d’expert dans le cadre de telles acquisitions, notre métier et nos compétences nous poussent plus naturellement à examiner le passé afin de déterminer les principales zones de risques de l’entreprise, telles qu’elles peuvent être appréhendées au travers de cet historique comptable et financier. Certes, le passé comptable d’une société est un élément déterminant, mais l’erreur classique est de trop se focaliser sur ce seul exercice. Tout l’art consiste, en effet, pour nous, à doser les travaux entre l’examen de la situation comptable à la date de rachat, la projection de l’activité dans le business plan prévisionnel, et surtout les facteurs clés de succès (ou des risques) de l’entreprise. Le succès de telles acquisitions ne peut en effet survenir, à mon sens, dès lors que ces trois éléments ont été parfaitement cernés. 

 

Décrire ici en quelques lignes les points essentiels attachés à une telle analyse est évidemment impossible. Toutefois, l’expérience de ces opérations nous conduit à souligner les axes suivants:

 

1) ORGANISATION COMPTABLE, RÉGULARITÉ JURIDIQUE, CONTRÔLES FORMELS

 

Ces aspects doivent être analysés avec la plus grande attention. L’expérience nous a enseigné qu’il est bien souvent plus profitable de reprendre les clés d’une entreprise parfaitement gérée avec des concepts apparemment peu novateurs, que celles d’une entreprise à la pointe de la technologie mais désorganisée. En effet, au delà des enseignements fournis, il faut toujours y prêter la plus grande attention car ils reflètent souvent la personnalité des dirigeants et la manière dont les obligations sont gérées. En cas de contrôles négatifs, la plus grande vigilance s’impose, et bien souvent mieux vaut « passer son chemin ».

  • Organisation comptable : qualité de l’organisation et indépendance sont le premier maillon de l’analyse.

Bien sûr, dans ce chapitre tout dépend de la taille de la structure appréhendée. Une société de 100 salariés n’a pas les mêmes contraintes qu’une autre de 5 personnes. Toutefois, il est utile de cerner la manière dont les services financiers sont gérés : qualifications des responsables, ancienneté, autonomie vis à vis de la direction et contrôle externe sont des points essentiels. Il est évident que plus l’organisation sera autonome et structurée, plus l’information financière sera digne de confiance. Les questions de savoir si un expert-comptable externe intervient (quelle est la nature de sa mission ? a-t-il produit des notes de synthèse annuelles ?…) et si un commissaire aux comptes est en place (SA et SAS notamment) sont des points majeurs. Dans le cas d’un contrôle par un commissaire aux comptes, il est indispensable de demander communication de ses 3 derniers rapports (général et spécial, ou autres le cas échéant (article 230)) afin de s’assurer de l’opinion émise (certification pure et simple, observations ou réserves, voire refus de certification). Dans ce dernier cas, mieux vaudra bien souvent arrêter l’analyse à ce stade ou en tirer, au moins, toutes les conséquences sur les modalités d’acquisition.

  • Régularité juridique : attention aux documents non à jour

Il est essentiel de prendre connaissance, très tôt, des registres légaux (livre d’assemblées, conseils d’administration, rapports de gestion). Ceux ci doivent être reportés sur les livres côtés et paraphés, signés et à jour à la date de cet examen. Au mieux, des documents mal tenus sont le reflet de négligences (qui peuvent avoir alors d’autres conséquences), au pire des retards anormaux peuvent traduire des désaccords entre associés ou des éléments majeurs susceptibles de peser sur la transaction en cours. Autant dire que tout acquéreur a le plus grand intérêt à ce que tous ces éléments formels soient totalement à jour à la date de l’opération car au delà des conséquences immédiates que cela peut avoir, les recours sont fondamentalement différents entre des faits déterminants non reportés sur des livres légaux si ceux-ci étaient à jour, et des documents non à jour dont l’acquéreur se soucierait peu. Dans un cas, une action pour dissimulation peut s’engager rapidement, dans l’autre, la négligence de l’acquéreur est de nature à réduire très significativement les recours possibles. 

  • Contrôles formels 

Les derniers contrôles « vécus » par la société sont des éléments très instructifs. Une demande, par écrit, du dernier contrôle fiscal, Urssaf, voire inspection du travail doit être systématiquement faite pour juger des passifs potentiels. Bien sûr, toute absence déclarée de tels contrôles, par le cédant, devra être confirmée par écrit par le cédant avec son engagement clairement stipulé. Il est en effet peu usuel qu’une entreprise n’ait subi aucun contrôle de ce type au cours des 5 derniers exercices.

 

2) COMPTABILITÉ ET FINANCES

 

Ici aussi, on ne peut résumer l’essentiel des contrôles clés nécessaires à « border » ce type d’acquisitions. Cependant, dans les points majeurs, il convient de souligner :

  • La comptabilité : l’importance des règles et méthodes adoptées

Comme cela est évoqué ci-après, l’annexe des comptes annuels est un élément majeur puisqu’elle fournit, entre autre, le détail des règles et méthodes comptables suivies. Il est notamment essentiel d’y vérifier les politiques d’amortissement suivies (attention aux durées d’amortissement trop longues), les méthodes de provisionnement, et plus généralement toute méthode décrivant les points clés d’arrêté des comptes (exemple : prise en résultat des contrats à long terme, en-cours de production, etc…).

 

Par ailleurs, la lecture du bilan comporte quelques éléments clés sur lesquels il faut être particulièrement vigilant : charges et produits constatés d’avance et spécialement charges à étaler. Lorsque les montants sont importants, une vérification spécifique de ces éléments est à effectuer.

 

Bien sûr, ces éléments ne sont qu’une partie des investigations essentielles à mener, lesquelles sont indispensables, en n’oubliant pas que les annexes sont trop rarement fournies sur ces points, d’où l’importance des questionnements à entreprendre. 

  • Comptabilité et finances : le résultat est un aspect, les cash-flow en sont un second, dont l’analyse est indispensable

L’analyse du résultat, notamment récurrent, est évidemment une donnée essentielle qui permettra de juger de la rentabilité attendue d’une acquisition. Cependant, le lien entre résultat et cash flow doit être soigneusement établi pour vérifier la cohérence des données fournies. Un résultat stable ou en hausse alors que la trésorerie chuterait est, au mieux, le signe d’en cours clients ou fournisseurs mal gérés. Plus probablement, c’est l’indication de problèmes de recouvrements clients, voire d’impayés ou encore d’investissements autofinancés qui grèveront les capacités distributrices de la société (d’où l’incidence sur le financement de l’opération à valider). Au delà, le mode d’appréhension du résultat peut être à réexaminer en détail (normes d’enregistrement du chiffre d’affaires, litiges…).

  • L’importance de comprendre « la vie » du résultat 

Les normes comptables sont ainsi faites que le principe de séparation des exercices est naturellement un maillon central des comptes établis par les sociétés commerciales, quelqu’en soit la taille. D’où l’intérêt, sans se perdre dans les détails, de comprendre comment a évolué le résultat au cours des 3 derniers exercices (le chiffre 3 étant fortement recommandé, 2 étant insuffisant). Notamment, dans cet examen, la revue des taux de marge générés sur ces périodes est à examiner avec examen corollaire des comptes afin de valider ce qui est intégré ou non dans les coûts d’achats des matières ou prestations inclus dans la « marge brute ».

 

Les évolutions des principaux postes (produits et charges) au cours de ces trois exercices devront faire l’objet d’un commentaire éclairé de la direction, en présence du responsable financier. Là aussi, la plus grande vigilance s’impose sur des variations mal expliquées, ou floues. Qu’elles relèvent d’un événement ponctuel est une chose non nécessairement inquiétante, qu’elles traduisent une tendance à long terme entraînant un effritement des marges et du résultat devient plus préoccupant.

 

En résumé, on n’insistera jamais assez sur le fait que l’analyse dynamique d’un bilan est toujours plus probante que celle de la photographie faite à une date T. Les comptes sont formés des éléments enregistrés au bilan et au compte de résultat mais également des engagements hors bilan, normalement mentionnés en annexe des comptes.

 

Ce point doit également être souligné tant il est important et tant l’évolution a été sensible ces dernières années. A cet égard, l’annexe prend une importance grandissante dans l’arrêté des comptes. Notamment, les engagements hors bilan sont à y mentionner, mais les pratiques sont diverses et bien souvent les engagements y sont sous évalués. On peut notamment mentionner les plus fréquents : engagements de crédit-bail, engagements en matière de retraite (à mentionner, ou à provisionner directement dans les comptes), engagements donnés à titre de garantie, clauses de retour à meilleure fortune… Ce type d’engagements est à vérifier soigneusement avec les contrats concernés car il diminuera naturellement les cash-flows futurs. Et lorsque le repreneur souhaitera « casser » ces contrats, bien souvent des indemnités spécifiques seront prévues, et généralement significatives.

 

Enfin, dans les points importants à valider, on n’oubliera pas de vérifier la rubrique des provisions afin de s’assurer des éléments fournis en annexe. Mais attention toutefois : rien ne dit qu’ils sont toujours exhaustifs ni que leur évaluation ne peut être contestée.

 

Voici donc un ensemble de points qui nous paraissent essentiels avant toute reprise. Toutefois, s’ils sont essentiels, ils ne sont certainement ni exhaustifs ni suffisants. Il reste notamment, à ce stade, à regarder l’avenir et la manière dont peut-être appréhendé le business plan-prévisionnel et les zones « classiques » de risque à suivre.


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