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Envoi en possession : les notaires également en première ligne !

La loi dite de "modernisation de la justice du XXIe siècle" renforce la déjudiciarisation en matière familiale, augmentant notamment le rôle du notaire en matière d'envoi en possession.

L’envoi en possession obligeait jusqu'à présent le légataire universel désigné par testament olographe ou mystique à faire contrôler par le juge la validité apparente du testament dès lors qu’il n’y a pas d’héritier réservataire (C. civ. art. 1008). Or, il était reproché à cette procédure d’allonger de un à deux mois la durée de traitement des dossiers de succession, de multiplier les formalités et de présenter un coût supplémentaire pour les justiciables (coût des formalités et honoraires de l’avocat dont l’intervention est obligatoire) (Rapport n° 121 de M. Y. Détraigne, déposé au Sénat le 28-10-2015).

 

Pour les successions ouvertes à compter du 1er novembre 2017, l'automaticité de l’envoi en possession est donc supprimée avec l’abrogation de l’article 1008 du Code civil. En contrepartie, « le notaire vérifiera les conditions de la saisine du légataire au regard du caractère universel de sa vocation et de l’absence d’héritiers réservataires. Il portera mention de ces vérifications sur le procès-verbal [de dépôt, d’ouverture et de description du testament] » (C. civ. art. 1007 modifié). Ce point a d’ores et déjà été critiqué alors que le projet de loi était encore en discussion devant le Parlement, en raison notamment du risque de responsabilité accrue pour le notaire lorsque la qualification du legs posera difficulté (S. Le Chuiton, Le notaire et l'envoi en possession : chronique d'une semi-mort annoncée : JCP N 2016 act. 828). L’occasion d’une réforme d’ensemble de la mise en possession du légataire est en outre manquée (S. Le Chuiton, précitée).

 

L’envoi en possession ne disparaît pas totalement pour autant. Il renaît de ses cendres en cas de contestation. Dans le mois suivant la réception par le greffier du tribunal de grande instance du lieu d’ouverture de la succession de l’expédition du procès-verbal de dépôt du testament et de la copie figurée de celui-ci – formalités qui sont à la charge du notaire ayant dressé le procès-verbal –, tout intéressé pourra s’opposer à l’exercice de ses droits par le légataire universel. Or, dans ce cas, le légataire devra se faire envoyer en possession. Les modalités de cette nouvelle procédure « d’envoi en possession sur opposition » ont été déterminées par décret en Conseil d’Etat (décret 2016-1907 du 28-12-2016, JO 29 texte n° 62, sur lequel nous reviendrons prochainement). En visant « tout intéressé », le texte concerne au premier chef les héritiers légaux évincés par le testament.

 

A noter : cette loi dite J21 accroît également le rôle du notaire en matière d'option successorale (voir La Quotidienne du 13 janvier 2017).

Pour en savoir plus sur l'envoi en possession, voir Memento Patrimoine n° 23014.

Emmanuel de LOTH

Loi 2016-1547 du 18-11-2016 : JO 19 texte n° 1 

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne